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TEMOIGNAGE DE SPORTIF DE HAUT NIVEAU
KAKA

               Un chrétien Ballon d'Or de foot

Le milieu de terrain brésilien de l’AC Milan Kaka, un chrétien évangélique, a été sacré Ballon d’Or de football 2007. Cette récompense consacre le meilleur joueur de football de l’année.

Kaka vient d’être désigné Ballon d’Or 2007, une récompense supplémentaire pour le brésilien élu joueur de l’année en octobre dernier. Arrivé en 2003 de Sao Paulo, Kaka est aussi un pièce maîtresse la Seleçao.

Kaka, chrétien évangélique et fier de l’être

Quand on demande à Kaka le nom de son idole, le milieu de terrain de la Seleção répond : « Jésus », avant de citer ses glorieux ­ et laïcs ­ aînés Raï et Zico. Quand il prendra sa retraite, c’est décidé, Zé Roberto, lui, deviendra pasteur. Quant à Lucio, Gilberto ou Mineiro, pas la peine d’aller tailler le bout de gras avec eux dans le vestiaire : avant chaque match, ils prient. En Allemagne pour le Mondial, ces joueurs brésiliens plus quelques autres se réunissent chaque jour pour rendre grâce à Dieu. Loin du rite superstitieux individuel, ces séances sont de vrais rendez-vous collectifs. Du reste, la délégation auriverde comprend en Europe un « chapelain informel », Alex Dias Ribeiro, et un pasteur, Anselmo Reichardt. Ancien pilote de F1 (enfin, surtout de F3), Ribeiro s’était fait remarquer au tournant des années 80 dans les paddocks pour sa foi excentrique et son casque, sur lequel il avait marqué l’inscription Cristo salva (« Christ sauve »). La veille des grands prix, les observateurs venaient le consulter pour tenter de savoir s’il fallait envisager les pneus slicks ou non. La presse se foutait gentiment de lui. Elle a eu tort : Ribeiro est aujourd’hui le très officiel gourou des Athlètes du Christ, cette association qui réunit 4 000 sportifs brésiliens se réclamant de diverses obédiences évangéliques. Parmi eux, des gloires passées de la Seleção, comme Silas, Muller et Taffarel. Mais aussi, donc, des stars actuelles, dont le credo est le suivant : vivre intensément sa foi et la propager.

Local anonyme. Depuis 1990, Alex Ribeiro accompagne la Seleção à chaque Mondial pour fournir une assistance spirituelle aux joueurs, « croyants » ou non. La première fois, « à l’invitation des joueurs ». Aujourd’hui, à l’initiative de l’association. C’est que Ribeiro est comme chez lui au sein du staff auriverde. Rencontré l’an dernier dans son petit local anonyme de São Paulo, Alex Ribeiro faisait ses comptes. « En 1990, Jorginho, Taffarel et Silas priaient avec nous. En 1994, Zinho et Paulo Sergio renforçaient l’association. Aujourd’hui, nous avons Kaka, Lucio et Edmilson, bien sûr, mais notre discours touche aussi les jeunes comme Cicinho. » L’actuel entraîneur, Carlos Alberto Parreira, n’a émis aucune objection, du moins officiellement. « J’aime avoir des Athlètes du Christ dans mon équipe, car c’est l’assurance de pouvoir compter sur des joueurs consciencieux et disciplinés », était-il allé jusqu’à déclarer lors de son arrivée, après le Mondial asiatique. Ses rencontres avec les joueurs, Ribeiro les relate sur le site Internet des Athlètes du Christ. Le 13 juin, juste avant le premier match du Brésil, contre la Croatie, il écrit : « Grâce à Zé Roberto, j’ai pu assister à l’avant-dernier entraînement collectif de la Seleção. J’ai invité beaucoup de monde à la réunion. » A sa grande « surprise et allégresse », outre les cinq joueurs chrétiens, des « non-croyants » ont également répondu à l’appel : « Cicinho, Cris, Fred, Luizão et un membre de la commission technique. » La réunion peut commencer : « [Après] la lecture par Mineiro d’un passage de la Bible, nous avons prié pour le match contre la Croatie, demandant la protection [divine] contre les contusions, et la paix de l’esprit pour affronter la tension. » Résultat : 1-0, but de Kaka, l’homme dont le répondeur téléphonique vous accueille avec un très fidèle « Dieu vous bénisse ». Son but, le joueur lui-même a d’ailleurs estimé le devoir au Seigneur, tandis que Renascer Em Cristo, l’Eglise néopentecôtiste à laquelle il appartient, exaltait ses « pieds apostoliques ». Au Brésil, pays profondément croyant et superstitieux, il est communément admis dans le milieu du football que la foi peut améliorer la performance des joueurs. Ceux-ci ont d’ailleurs l’habitude de se signer en entrant sur le terrain... ce qu’ils font généralement du pied droit. De leur côté, certains clubs, comme le mythique Vasco de Gama, à Rio, abritent des chapelles et font appel aux cultes afro-brésiliens pour les matchs décisifs. Les entraîneurs de la Seleção n’échappent pas non plus à cette religiosité. L’actuel, Carlos Alberto Parreira, est un dévot de saint Antoine, dont il a emporté l’image en Allemagne. Son prédécesseur, Luiz Felipe Scolari, lui, préfère Notre-Dame de Caravaggio. En 2002, il s’est rendu à pied à son sanctuaire, dans le Rio Grande do Sul, pour la remercier d’avoir permis la conquête du cinquième titre mondial du Brésil... Une victoire que Kaka, Edmilson et Lucio avaient, eux, célébrée par une prière, agenouillés main dans la main au milieu du terrain. Relativement récente, la percée des évangéliques dans les stades correspond à leur formidable essor au Brésil dû à la mouvance néopentecôtiste, qui affirme que la foi est un moyen infaillible pour réussir dans la vie. Dans le plus grand pays catholique du monde, ils représentent désormais 15,4 % de la population. Pendant longtemps néanmoins, « les athlètes n’étaient pas les bienvenus dans les Eglises évangéliques, qui assimilaient le sport aux jeux de hasard et l’accusaient d’éloigner le fidèle de la religion », explique Cecilia Mariz, sociologue des religions. « C’était surtout le cas du football, qui se joue le dimanche, jour du Seigneur », renchérit Baltazar, vice-président des Athlètes du Christ et lui-même ancien attaquant de haut niveau à Botafogo et à l’Atletico Madrid. L’une des principales Eglises pentecôtistes, l’Assemblée de Dieu, allait même jusqu’à interdire à ses fidèles de pratiquer le sport national ! C’est dans ce contexte que l’association Athlètes du Christ a été créée, en 1984, par João Leite, alors gardien de but de l’Atletico Mineiro. « L’objectif était double, explique l’anthropologue Airton Jungblut, auteur d’une thèse sur la question. Evangéliser le milieu sportif, mais aussi créer un espace où les sportifs évangéliques pourraient se réunir et prier pour que soient résolus les problèmes liés à leur carrière, puisqu’ils n’avaient pas leur place dans les Eglises. »

Scepticisme. Les choses ont commencé à changer il y a une dizaine d’années. « Vu la popularité du foot au Brésil, les Eglises ont craint de perdre des fidèles, même si beaucoup d’entre eux cherchent justement un contre-modèle, dit Cecilia Mariz. Elles ont compris aussi que le sport aidait à soustraire les gens à l’alcool. » « Et que la célébrité des joueurs pouvait leur permettre de gagner des fidèles », ajoute Baltazar, convaincu que le mode de vie « chrétien » des Athlètes du Christ a contribué à mettre fin aux préjugés contre les footballeurs. Et pour ça, les Athlètes du Christ ont trouvé en la personne d’Edmilson leur symbole. Absent de dernière minute du Mondial Allemand pour cause de blessure ­ ce qui inciterait plutôt au scepticisme, mais bon ­, Edmilson est un ancien alcoolique devenu irréprochable. « Quand j’étais adolescent, on sortait, on allait en discothèque pour boire des bières, beaucoup de bières. Le dimanche, j’étais cuit. Le jour où j’ai rencontré Jésus, j’étais bien, je savais que j’avais trouvé quelque chose », nous récitait-il l’an dernier. Cette stratégie de l’exemplarité est également celle de Renascer Em Cristo, l’Eglise de Kaka, qui s’adonne au marketing religieux sur son site Internet. « Faites comme Kaka, un homme apostolique qui lève le nom de Jésus-Christ dans le monde entier. Venez faire partie de Renascer, une Eglise de miracles, en cliquant ici », dit le texte, qui renvoie à un formulaire d’inscription pour assister au « culte virtuel ». Les Athlètes du Christ ont aussi profité du Mondial pour lancer un DVD où plusieurs joueurs de la Seleção racontent les bienfaits de leur « rencontre avec Dieu » et invitent le spectateur à les imiter. Parmi eux, Lucio, évangélique de naissance mais devenu « chrétien » après avoir commencé à assister aux réunions d’Athlètes du Christ. « Jésus a fait une grande différence dans ma vie professionnelle mais aussi familiale, témoigne-t-il. Quand Il est aux commandes, on sait que ce qu’il y a de mieux va nous arriver. » Le prosélytisme est donc la grande affaire d’Alex Dias Ribeiro. « Il s’agit de favoriser la conversion des joueurs de la Seleção et d’apprendre à ceux qui sont déjà évangéliques comment tirer profit de la médiatisation unique de la Coupe du monde pour transmettre la parole de Dieu à des centaines de millions de téléspectateurs », explique Baltazar. Par exemple, en enfilant les fameux T-shirts à message religieux ­ « 100 % Jesus » ou « Jesus loves you » ­ qu’on voit souvent sur les joueurs. Imprécations. Pour l’instant, au sein de la Seleção, seul Fred le Lyonnais semble s’être montré sensible à ces imprécations. La preuve ? Il a répondu « Dieu me bénit » ­ phrase typique des évangéliques ­ quand on lui a demandé son sentiment sur son but marqué contre l’Australie quelques minutes seulement après son entrée en jeu. « Du coup, tout le monde s’est demandé s’il était Athlète du Christ, se félicite l’association sur son site. Fred a pris part aux réunions conduites par Alex et le pasteur Anselmo. Nous comptons sur les prières de tous pour que la semence trouve en lui un sol fertile, résiste, croisse et donne beaucoup de fruits. » En revanche, toujours pas de nouvelles de Ronaldo, la star qui rentre de boîte à l’heure où ses coéquipiers prennent le petit déjeuner.

Portrait de Kakà, milieu de terrain au Milan AC, meilleur joeur et Ballon d’Or 2007

Le milieu de terrain du Milan AC, star montante du football, n’hésite pas à proclamer sa foi et utilise son sport comme vecteur d’évangélisation. Son visage propre et son mode de vie sain ont séduit les annonceurs. Portrait.

« Oui, si Jésus me le demande, pour évangéliser davantage, je serais heureux d’arrêter ma carrière, de sacrifier le don que j’ai reçu de savoir jouer au football pour imiter la foi d’Abraham qui, lui, était prêt à immoler son fils Isaac. » Le Brésilien Ricardo Izecson dos Santos Leite, surnommé Kakà, 23 ans le 22 avril prochain, a les yeux qui brillent lorsqu’il parle de son Eglise et de sa foi. « Jésus occupe la première place dans ma vie », affirme-t-il. Confortablement calé dans un sofa blanc, Kakà cherche ses mots, scrute le ciel laiteux à travers la baie vitrée du centre d’entraînement du Milan AC, et accompagne d’un doux sourire la force de chacune de ses phrases : « Mon rôle est de prêcher, d’annoncer le Royaume du Christ et d’attendre qu’Il revienne. »

Le monde du football contaminé par la corruption, la superficialité et le matérialisme peut sembler inadapté à un homme qui a décidé de marcher sur le chemin étroit du christianisme. Toutefois, le milieu de terrain des Milanais est aussi conscient que l’extrême médiatisation de son sport est un puissant vecteur d’évangélisation : le 30 juin 2002, au soir de la finale mondiale remportée par le Brésil face à l’Allemagne (2-0) à Yokohama, il arborait fièrement un tee-shirt portant l’inscription « I belong to Jesus » (J’appartiens à Jésus). Agenouillé, il avait prié en mondovision en compagnie de ses équipiers Edmilson et Lucio, eux aussi Athlètes du Christ. « Je veux que mon comportement, davantage que les discours, soit le meilleur témoignage possible de mes fermes convictions, dit-il. Dans les vestiaires, certains équipiers me demandent des prières et Andreï Chevtchenko aime me poser de nombreuses questions sur mon culte. »

Une main tendue vers les cieux, l’autre posée sur le cœur, Kakà dédie chacun de ses buts « au Créateur ». Les tifosi l’adorent. Au sens propre du terme. Mais le Brésilien refuse catégoriquement cette adulation, qu’il juge incompatible avec l’humilité requise par le christianisme : « Je parle avec les supporters, je pose pour une photo avec eux, mais j’essaie toujours de leur expliquer que je suis comme eux, un homme normal, avec ses joies et ses peines. »

Comment résiste-t-il aux tentations de la chair ? En Italie plus qu’ailleurs, le footballeur incarne l’idéal sexuel féminin. Le Brésilien affirme ses principes : « Aujourd’hui, les gens couchent les uns avec les autres sans même se connaître, déplore-t-il. La Bible explique qu’il doit exister un sentiment noble entre l’homme et la femme qui ont des relations sexuelles. Depuis deux ans je suis fiancé avec Caroline. Elle a 17 ans et vit encore au Brésil. Je veux suivre l’exemple de fidélité de mes parents qui sont mariés depuis vingt-trois ans. »

Beaucoup ont erronément attribué la foi profonde qui anime le Brésilien à un événement catastrophique de son existence. En octobre 2000, Ricardo, en vacances chez ses grands-parents, fut victime d’un grave accident : il se brisa la sixième vertèbre en heurtant le fond d’une piscine après une glissade sur un toboggan. « Cet épisode m’a certainement renforcé sur le plan spirituel, Dieu m’a aidé à guérir alors que je risquais d’être paralysé pour toujours sur une chaise roulante, mais ma foi remonte à mon enfance, j’ai grandi dans une famille évangélique et je me suis fait baptiser à l’âge de 12 ans », rappelle-t-il.

Il ne faut pas davantage chercher d’explication sociale à son zèle religieux. Kakà n’a jamais connu la pauvreté, il n’est pas issu des favelas de Rio de Janeiro. Fils d’un ingénieur et d’une enseignante, il est né à Brasilia puis sa famille a déménagé dans le quartier bourgeois de Morumbi à São Paulo. Il connaît le risque qui guette les riches, la parabole du chameau et du trou de l’aiguille lue maintes fois, mais vous répond qu’il « ne laissera jamais rien s’immiscer entre lui et Dieu ».

Son regard se perd encore dans le matelas de nuages lourds qui bouchent l’horizon. L’heure de l’entraînement approche mais Kakà semble ravi d’exposer ses croyances, avec conviction et respect. « Je consulte la Bible tous les jours, sourit-il. Caroline m’en a offert un exemplaire destiné à l’étude personnelle. En ce moment je lis la Genèse mais je préfère les Psaumes, le chapitre 23 est magnifique. » Sur l’autoradio de sa Chrysler, il écoute des cassettes de cantiques et de prières. Il ne fréquente pas les boîtes de nuit à la mode du Corso Como à Milan, parce qu’il avoue s’y sentir « mal à l’aise ». Son visage propre et son mode de vie sain ont séduit les annonceurs qui, selon le service marketing du Milan AC, sont des dizaines à lui proposer des contrats de sponsorisation.

Elu Oscar du Calcio en 2004, candidat au Ballon d’or 2005, le Brésilien se divertit sur les terrains sans oublier sa raison de vivre, son espérance eschatologique : « Har-Maguédon ? Jésus avait mis en garde ses disciples en annonçant qu’il y aurait des guerres et des rumeurs de guerres, des tremblements de terre dans un lieu après l’autre... mais qu’il ne fallait pas s’effrayer parce que ces choses doivent arriver, explique passionnément Kakà. Regardez autour de vous, observez attentivement les événements, je pense que nous nous sommes approchés de la Fin. »

Sources : CoeurNet.org - Liberation.fr